Réforme du CoDT: donnons du pouvoir à celles et ceux qui protègent nos ressources naturelles !
– Carte Blanche parue dans « le Soir » –
En Wallonie, la réglementation concernant l’aménagement du territoire et l’urbanisme, ou Code de développement territorial (CoDT), est en cours de réforme. La société civile y voit une opportunité pour protéger plus efficacement les terres nourricières et les espaces naturels. Si, aujourd’hui, il est possible de demander une modification du plan de secteur pour bétonner des espaces non urbanisables, l’inverse n’est pas prévu par la législation. Pour plus de 45 associations et collectifs citoyens, demander que des espaces soient protégés de l’urbanisation est un droit légitime pour aider à la protection de la nature et de l’agriculture familiale wallonne.
Contexte : des ressources en danger
La réforme du CoDT s’inscrit dans un contexte de pression croissante sur nos ressources naturelles.
En Wallonie, chaque jour, l’équivalent de 3 terrains de foot disparaît sous le béton, soit en moyenne 1560 hectares par an. La Belgique se place en deuxième position du classement européen de l’étalement urbain [1].
Les plans de secteur déterminant les différentes affectations du sol (zone agricole, zone d’habitat…) ont été adoptés il y a plus de 40 ans. Ils ont favorisé cet étalement urbain, principalement aux dépens des terres agricoles. De nombreuses ressources naturelles se situent en zone constructible et sont donc directement menacées par l’urbanisation.
Nos terres, pourtant essentielles à la recherche de souveraineté alimentaire et à la poursuite du modèle d’agriculture familiale wallon, sont en danger. Près de 50 000 hectares utilisés par nos agriculteurs et agricultrices, mais constructibles selon ces plans, pourraient disparaître demain si rien n’est fait pour les protéger [2].
Des écarts qui font la part belle au béton
Ce plan de secteur n’est pourtant pas immuable, et si l’on en croit les chiffres de ces dernières années, il semble toujours bouger dans une même direction : celle du béton. Entre 2005 et 2016, 1589 ha de terres agricoles ont été convertis par la Wallonie ou les intercommunales en zones urbanisables, principalement pour créer de nouvelles zones d’activités économiques (zonings). Malgré les promesses de compensation, seuls 352 ha ont été ré-attribués à l’activité agricole. Ils sont souvent d’une qualité moindre que la terre initiale [3].
En creusant cette réalité, on découvre un fait étonnant : si le CoDT permet à une personne physique ou morale, privée ou publique de faire une demande de révision du plan de secteur, ce n’est actuellement possible que pour créer de nouvelles zones à bétonner. Pour ceux et celles qui voudraient protéger les terres nourricières de l’urbanisation, l’opportunité de créer de nouvelles zones non urbanisables n’existe tout simplement pas.
Inverser la tendance – ouvrir un droit légitime pour la société civile
Ce déséquilibre révèle un manque de prise en compte des enjeux de préservation de nos biens communs. Nous insistons sur l’urgence d’inverser cette tendance dans la réforme à venir.
Différents chemins sont possibles, notamment celui d’ouvrir ce droit, simple et légitime, pour la société civile et les citoyen·nes de demander une modification du plan de secteur au motif de protection, et non de destruction de nos ressources naturelles. Permettons qu’au nom des enjeux de préservation du modèle d’agriculture familiale wallonne, de souveraineté alimentaire, de préservation de la biodiversité, on puisse protéger les terres de l’urbanisation.
Pour que le territoire wallon soit le territoire de toutes et tous et non de quelques-un·es, il est essentiel de permettre à la société civile, aux citoyens et citoyennes d’être une force de proposition dans l’aménagement du territoire et de ne pas les cantonner à un rôle défensif chaque fois qu’un projet nuisible se présente.
Cette mesure représenterait un premier pas démocratique pour permettre à la population wallonne d’activement s’impliquer dans la gestion de son territoire. Évidemment, des initiatives bien plus ambitieuses seront nécessaires pour protéger les terres de l’artificialisation. Cela demandera à nos gouvernements successifs de cesser de considérer nos terres comme des marchandises pour enfin les reconnaître comme des biens communs, devant être gérés et protégés comme tels.
Sources
[1] Iweps (2022), « État de l’environnement wallon : Artificialisation du territoire ». http://etat.environnement.wallonie.be/contents/indicatorsheets/TERRIT%202.html
[2] Grandjean, M., (2016), « Le foncier agricole face à l’artificialisation des terres en Wallonie : Analyse croisée des données issues du cadastre et des données relatives à la superficie agricole utile ». Note de recherche CPDT, n°66.
[3] Defourny, A., (2023). “La zone agricole, espèce menacée en voie d’extinction ?”. Canopea. https://www.canopea.be/la-zone-agricole-espece-menacee-en-voie-dextinction/
Signataires:
Agroecology in Action
FIAN Belgique
Terre-En-Vue
Canopea
Occupons le terrain
Réseau des GASAP
Celly-C-Nous
Collectif Le Bois du Val
Collectif « Les Antennes de Lessive »
Comité Villageois de Sart-Bernard
Collectif 5C
Biodiversité asbl
Vert-et-Vie asbl
Ardenne et Gaume
Association Rî des Moulins
N931
Quinoa asbl
Touches pas à mes Vennes
ASBL Le Bois d’à côté
Cercles des Naturalistes de Belgique asbl
Objectif Résilience Alimentaire asbl
Heusy Grandeur Nature asbl
Autre Terre asbl
Non aux Eoliennes en forêt – SOS Bois de Herbaimont
Coopérative Paysans-Artisans
Collectif “Non aux routes Pairi Daiza”
Entraide et Fraternité
CLAP – Comité Liège Air Propre
POUR ATTAC Bruxelles 2
CPVH (Collectif pour la Préservation du Village de Hondelange)
Les Ami.e.s du champ des Cailles
Stop Alibaba &co
Les Amis de la Terre – Belgique asbl
SCI-Projets Internationaux ASBL
Le Début des Haricots ASBL
CNCD-11.11.11
Attaque la ZACC – Herve
Fabriek Paysanne
Vert Prairie (Horion-Hozémont)
Braine Autrement
Groupement CHB
Humundi
Sauvons le bois d’Avroy
Greenpeace Belgium
Réseau de Collectifs en Recherche de Résilience
Tuiniers Forum des Jardiniers
Pascale Vanderlinden
Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux