Le débat parlementaire qui s’est tenu ce matin sur le respect des engagements pris en matière de souveraineté alimentaire, de préservation de la biodiversité et de mesures climatiques, a mis en évidence les faiblesses actuelles en matière de politique d’aménagement du territoire et de fonctionnement des intercommunales.

Dans le présent dossier, ce sont 28 hectares de forêts et de terres agricoles de haute valeur écologique qui sont menacés à Hondelange, au sud de la province du Luxembourg. Alors que la majorité des parlementaires souligne la nécessité d’une politique cohérente d’aménagement du territoire, en ligne avec les engagements de la Déclaration Politique Régionale, le Parlement n’a pas réussi à adopter un engagement fort concernant la nécessité de protéger les forêts et les terres agricoles de la bétonisation.

Greenpeace, Canopea (anciennement Inter-Environnement Wallonie), le collectif de préservation du village de Hondelange (CPVH) et Occupons Le Terrain (OLT) regrettent ce manque de fermeté. Les organisations espèrent que la prochaine visite de terrain annoncée par le Ministre Borsus le convaincra du bien fondé des arguments et lui permettra de prendre une décision en faveur d’une protection des terres agricoles d’Hondelange.

Le débat a eu lieu à la suite de la pétition déposée par Adrien Blauen, un agriculteur biologique qui risque d’être exproprié des terres qu’il occupe, terres destinées à être artificialisées par l’intercommunale IDELUX. “Nous demandons des décisions courageuses pour préserver les terres nourricières et la biodiversité », exprime Adrien Blauen. « A notre époque, il n’est plus admissible de sacrifier égoïstement ces ressources au détriment des générations futures. Il existe de nombreux endroits qui ont été dédiés à l’activité économique et qui peuvent toujours servir à cet effet”.

Ecolo, le PTB et Les Engagés ont souligné les avis défavorables émis par les communes d’Arlon et de Messancy, ainsi que par le Pôle Environnement (CESE Wallonie). Ces instances se sont exprimées en faveur d’une économie agricole, nourricière, bien réelle, face au déploiement d’une économie industrielle potentielle. Malgré ces arguments, la majorité parlementaire n’a pas réussi à s’accorder pour faire respecter ces avis.

IDELUX martèle que le développement du zoning est impératif pour le maintien de l’emploi dans la province du Luxembourg, alors même que ces zones d’activités économiques créent peu d’emplois proportionnellement aux superficies qu’elles occupent et que les entreprises de la région frontalière luxembourgeoise font face à une grave pénurie de travailleurs. [1] La logique économique ne tient donc pas, particulièrement quand plus de 46 ha dédiés à l’activité économique sont disponibles et inoccupés dans la zone. Alors que les agricultrices et agriculteurs perdent leurs terres de manière irréversible, l’Intercommunale IDELUX réalise d’énormes bénéfices en créant, aménageant et vendant des sites d’activités économiques et industriels, qui restent pourtant vides des années plus tard. Il est incompréhensible que les missions d’une intercommunale publique comme IDELUX poursuivent des objectifs différents de ceux portés par la Déclaration de Politique Régionale.

La situation à Hondelange n’est en réalité qu’un aperçu de l’artificialisation croissante et symptomatique propre aux terres agricoles wallonnes. Depuis 1985, 616 km² de terres agricoles et 26,9 km² de forêts ont été artificialisés à des fins résidentielles et industrielles, et cette tendance est passée à 11,8 km² par an, soit 3,2 hectares par jour, depuis 2020. Cela va à l’encontre des engagements du gouvernement wallon en matière d’agriculture, de climat et de biodiversité. « Les forêts et les terres agricoles aux pratiques agroécologiques nous protègent des inondations, capturent naturellement le CO2, abritent une riche biodiversité et contribuent à notre souveraineté alimentaire. Nous devons impérativement préserver cette nature. Nous demandons donc au ministre Willy Borsus d’avoir le courage politique de protéger la nature – y compris les terres nourricières – du béton », a déclaré Ruth-Marie Henckes, experte en biodiversité à Greenpeace.

[1] https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2019-3-page-11.htm