Le Bois d’Imbrechies préservé… et bientôt toutes les forêts anciennes?

Le Bois d’Imbrechies préservé… et bientôt toutes les forêts anciennes?

Depuis plusieurs mois, le collectif « Sauvons le bois d’Imbrechies » s’est mobilisé contre le projet d’extension du zoning d’Harchies porté par l’intercommunale IDETA, qui menaçait cette forêt ancienne, située à deux pas d’une zone Natura 2000 (elle semble avoir été « oubliée » lors de la cartographie du réseau) et de la réserve naturelle d’Harchies. Les forêts anciennes sont des forêts dont le couvert boisé a été maintenu depuis au moins 1770, à l’époque des cartes de Ferraris.

Bien qu’elles aient pu faire l’objet d’une exploitation forestière (il n’existe plus de forêt primaire en Belgique), elles n’ont pas subi de changements d’affectation du sol, contrairement aux forêts qui ont été converties, pour une certaine période, en zones agricoles. Les forêts anciennes se distinguent par un sol forestier bien préservé et par une biodiversité importante: par exemple, certaines plantes à fleurs sont strictement inféodées aux forêts anciennes. Elles sont donc ce qui se rapproche le plus d’un écosystème naturel dans notre région.

Ces forêts ayant au moins 250 ans, il va de soi que leur destruction serait impossible à compenser à l’échelle d’une vie humaine. A l’heure où la chute dramatique de biodiversité est une limite planétaire largement dépassée, menaçant à moyen terme la survie de l’humanité, il nous paraît totalement aberrant que la destruction d’un tel écosystème puisse encore être envisagée! Cela résulte, d’une part, d’un manque de connaissances du porteur de projet, et d’autre part, d’une aberration dans la procédure de changement de plan de secteur. En effet, au stade de l’avant-projet, aucune étude d’incidences environnementales n’est requise: seul un dossier de base très simple est demandé. Sans avoir connaissance de l’intérêt exceptionnel du site pour la biodiversité, il semblait donc logique pour l’intercommunale de privilégier l’extension d’un zoning existant pour fournir de l’espace supplémentaire aux activités économiques. C’est pourquoi à ce stade de la procédure, le pôle Aménagement du Territoire du CESE (Conseil Économique, Social et Environnemental de Wallonie) avait rendu un avis favorable sur l’avant-projet (sur base de la bonne accessibilité du site par voie fluviale et routière et du fait qu’il s’implante en extension d’un parc d’activités existant) et le pôle Environnement s’était abstenu, estimant ne pas disposer d’informations suffisantes pour se prononcer (notamment en matière de biodiversité). C’est seulement à l’étape suivante qu’une étude d’incidences est demandée, dont le Gouvernement définit l’ampleur et le degré de précision.

Le collectif « Sauvons le bois d’Imbrechies » a donc interpellé le Parlement Wallon à ce sujet, grâce à une pétition ayant récolté plus de 3900 signatures. A la suite du brillant exposé réalisé par Alain Malengreau (ornithologue et membre du collectif), plusieurs parlementaires se sont exprimés en faveur de la préservation du bois, et le ministre Willy Borsus a déclaré qu’il conseillerait à IDETA de revoir son projet. Après réflexion, IDETA a donc finalement décidé de retirer sa demande.

Au-delà de la protection de ce site particulier, la mobilisation du collectif a contribué à porter dans le débat public la question de la préservation des forêts anciennes. La Stratégie Européenne pour la Biodiversité prévoit la mise sous statut de protection strict de toutes les forêts anciennes d’ici 2030, mais cet objectif n’a pas encore été transposé dans le droit wallon. La Stratégie Biodiversité 360°, portée par la ministre Céline Tellier et ayant récemment fait l’objet d’une enquête publique, prévoit une action dans ce sens (« Action 2.5.1.1. Assurer la préservation des forêts anciennes ») mais n’a pas encore été approuvée par le Gouvernement. Lors d’un débat politique organisé par le WWF après la conférence « Be Wild » dans le cadre du Festival Nature Namur le 19 octobre, les représentants de 5 partis (Ecolo, MR, PS, PTB et les Engagés) se sont positionnés en faveur de la préservation des forêts anciennes. Nous attendons avec impatience la concrétisation de cet engagement par un statut de protection légal, pour qu’à l’avenir la préservation de ces joyaux de nature ne soit plus tributaire de la mobilisation citoyenne!

Bien sûr, il ne s’agit que d’un premier pas dans la bonne direction; nous continuerons à nous mobiliser pour qu’à l’avenir, cette protection ne se limite plus aux forêts anciennes, mais que toutes les forêts wallonnes soient préservées de l’urbanisation!